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"Ils ne comprennent pas, ils ont besoin d’une thérapie": les enfants d'Élodie, en situation de handicap, se retrouvent sans centre d'accueil

Le centre de revalidation fonctionnelle Corto, situé dans la région de Charleroi, a cessé d'accueillir des enfants depuis fin avril. Malgré une décision de justice ayant temporairement suspendu la fin de son financement, le Tribunal du travail a confirmé la rupture de la convention avec l'AVIQ (Agence wallonne pour une vie de qualité). Un verdict qui a plongé plusieurs familles dans l’incertitude. Élodie, qui cherche un nouveau centre d'accueil pour ses deux enfants, témoigne.

Depuis fin avril, le centre de revalidation fonctionnelle Corto, situé à Mont-sur-Marchienne (province de Hainaut), a officiellement cessé d'accueillir des enfants souffrant d'un trouble du spectre de l'autisme (T.S.A). 

Fin 2023, l’AVIQ (Agence wallonne pour une vie de qualité) avait annoncé qu’elle ne financerait plus cet établissement. Toutefois, cette décision a été suspendue par le Tribunal du travail du Hainaut (en avril 2024). Les parents avaient notamment réclamé un préavis de cinq ans, mais leur demande n’a pas été acceptée. Un verdict qui est tombé le 25 mars dernier.

Pour les familles, cette fermeture représente plus qu’un changement de structure. Pour Élodie, mamans de deux enfants pris en charge par l'ASBL Corto, il s'agit d'une coupure brutale dans leurs parcours thérapeutique. "Actuellement, il n’y a plus d’activités. Nous avons mené ce combat depuis décembre 2023. Ce n’est pas de maintenant", confie-t-elle.

En décembre 2023, l’AVIQ a donc invoqué une clause de la convention, qui lui permettait de rompre l’accord unilatéralement avec un préavis de trois mois. "En théorie, on ne rompt pas une convention comme ça. Quand il y a des fermetures comme ça, c’est dû à des cas de maltraitances. Et on est à peu près certains qu’il n’y en avait pas", estime Élodie.

On parle d’enfants en situation de handicap

L’ASBL Corto a alors saisi la justice avec notamment comme objectif d'obtenir un report de la date de fermeture, et pour éviter une rupture nette dans l’accompagnement. "On n’avait pas le pouvoir de contester la fermeture. On voulait que nos enfants puissent poursuivre leurs soins au Corto en obtenant un préavis plus long", ajoute Élodie.

Une première audience en avril 2024 avait donc suspendu temporairement la décision de l’AVIQ. "L’ASBL a pu continuer ses activités. On est passé sur le fond en janvier 2025, où l’AVIQ a eu le loisir de présenter ses arguments quant à la fermeture du Corto. Mais à cette audience, il n’y a pas grand-chose qui en est ressorti. (...) On parle d’enfants, d’adolescents en situation de handicap... Ok, c’est écrit comme ça dans la convention, mais derrière, ce n’est pas correct."

Le problème pour Élodie est à présent le manque d'alternatives immédiates, elle qui doit trouver un nouveau centre d'accueil pour ses enfants. "Les listes d’attente sont énormes. En général, on est en moyenne à deux ans d’attente partout. Le préavis nous tenait à cœur, car il n’y a pas de places derrière." 

L’AVIQ a présenté un nouveau centre de revalidation pédopsychiatrique à Charleroi (l'Oxalis), mais cette option est "inadéquate" pour Élodie. "On s’est rendu compte que, dans le fonctionnement de ce nouveau centre, cela n’allait pas coller pour les enfants du Corto... Le Corto offrait une offre adaptée à mes enfants, près de chez moi. C’est ce qui correspondait au profil de mes enfants."

Des enfants se retrouvent à la maison

La décision finale est tombée le 25 mars dernier. Le Tribunal du travail de Charleroi a confirmé la fin de la convention de revalidation fonctionnelle entre l’ASBL Corto et l’AVIQ.

Le centre Corto a donc dû se séparer d’une partie de son personnel spécialisé, et lors d’un conseil d’administration le 22 avril, il a ensuite été décidé de ne plus accueillir les enfants. "Ils ont dit que ce n’était pas raisonnable d’accueillir les enfants avec un personnel insuffisant. Ce n’est pas le but."

Aujourd’hui, Élodie se dit "inquiète". "Il y a des enfants qui se retrouvent à la maison du jour au lendemain, et ils ne comprennent pas. Ils ont besoin d’une thérapie."

Consciente de l’impact émotionnel d’une telle décision

L’AVIQ dit de son côté être "pleinement consciente de l’impact émotionnel d’une telle décision sur les familles".

"À l’époque, le tribunal avait suspendu provisoirement la rupture de la convention afin de permettre à Corto d’organiser la fin de la relation conventionnelle au vu de la vulnérabilité des enfants atteints de TSA (trouble du spectre de l'autisme)", indique l'Agence. "La juridiction souligne d’ailleurs qu’il est regrettable que l’ASBL Corto n’ait pas pris les mesures nécessaires permettant aux parents des enfants encore accueillis en son sein de se préparer au changement."

L'Agence wallonne explique que la convention avait été dénoncée fin décembre 2023, avec une prise d’effet au 13 avril 2024, "conformément aux clauses contractuelles". "Une décision prise non pas par l’AVIQ directement, mais par une commission technique de revalidation indépendante, puis validée par les comités de branche Santé et Handicap."

L’AVIQ indique avoir contacté individuellement les 14 familles concernées et propose un accompagnement par ses bureaux régionaux. "Il n’y aura donc pas de solution collective, mais bien un examen minutieux et objectif des besoins spécifiques de chaque enfant", insiste-t-elle. Huit familles ont déjà entamé ce processus. 

Une partie du nouveau centre de revalidation Oxalis a été temporairement réservée aux enfants du Corto. "Sur les 24 enfants, seuls 12 ont intégré la structure Oxalis (au Grand Hôpital de Charleroi)", précise encore l’Agence.

Face aux tensions, l’AVIQ déclare également: "Nous ne souhaitons pas traiter des situations individuelles avec quelques associations de parents ou sur la place publique." 

"Mes collègues ont reçu la plupart des parents et des pistes de solutions sont sur la table. On avance", a précisé Lara Kotlar, la porte-parole de l'AVIQ, ce 7 mai.

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