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Rédiger un mémoire en s’aidant de l’intelligence artificielle ? De plus en plus d’étudiants franchissent le pas. Et plutôt que de l’interdire, certains établissements d’enseignement supérieur choisissent d’encadrer cette pratique, devenue presque incontournable.
C’est l’épreuve ultime pour tout étudiant : la défense orale du mémoire. Marc espère clôturer en beauté cinq années d’études. « 80 %, donc une grande distinction », ambitionne-t-il. Son mémoire de 80 pages, structuré et rédigé pendant plus de six mois, a bénéficié d’un allié de taille : l’intelligence artificielle.
« Pour tout ce qui est regroupement des sources, et surtout pour trouver des sources pertinentes, ça m’a beaucoup aidé », explique-t-il. « Il suffit d’utiliser le bon prompt avec Copilot ou ChatGPT, et il en sort une liste de sources assez intéressante. »
À l’ICHEC, haute école de commerce, l’usage de l’IA est autorisé depuis plusieurs années, à condition de respecter un cadre strict. Simon Gérard, responsable de l’unité stages mémoires, précise : « Non seulement ce n’est pas quelque chose auquel on peut échapper, mais c’est aussi quelque chose qu’on doit apprendre à maîtriser. » Les étudiants sont donc formés à utiliser correctement ces outils, et doivent détailler leur recours à l’IA dans un tableau spécifique.
Cela peut appauvrir l’esprit critique
Car si ces technologies sont puissantes, elles présentent aussi des risques. Maurice Johnson-Kanyonga, expert en éducation, met en garde : « Bien souvent, l’IA produit des contenus stéréotypés, assez génériques. Cela peut appauvrir l’esprit critique : on pousse moins loin la réflexion, on a moins de recul face aux sources. »
Pour certains enseignants, cette révolution est comparable à celle qu’a représentée la calculatrice, il y a plusieurs décennies. « Depuis qu’on a la calculatrice, on fait des calculs plus complexes. Mais il faut quand même apprendre à calculer mentalement d’abord », illustre Nicolas Van Zeebroeck, professeur en stratégie numérique à l’ULB. « C’est pareil pour l’IA : il faut d’abord maîtriser la recherche et la synthèse avant d’y avoir recours. »
Intolérance face à la triche
À l’ICHEC, l’encadrement ne signifie pas pour autant tolérance face à la triche. La lutte contre le plagiat reste une priorité. « C’est très compliqué, mais on se base sur un faisceau d’indices : un style de rédaction incohérent, un mémoire trop superficiel, ou encore des sources inexistantes ou mal référencées », détaille Simon Gérard.
L’IA est donc devenue une composante naturelle des études supérieures. À tel point que Marc en a fait son sujet de mémoire : son influence dans les ressources humaines et la discrimination à l’embauche. Un thème de société… et un outil déjà bien ancré dans le monde du travail.